Soigner des animaux sauvages ce n’est pas facile tous les jours. Des questions, des remises en question, des échanges, des recherches, des essais… Fait-on les meilleurs choix ? Cette technique est-elle bonne pour l’animal par rapport à une autre ? Cette volière, va-t-elle convenir à cette espèce, comment faire sans dépenser trop d’argent, comment faire pour améliorer le confort de l’animal ?…

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Carte de déplacement de Jacques le gypaète

– Retour sur le soin du gypaète barbu

Mais le soin d’un gypaète barbu, au-delà du fait que cet oiseau soit très rare et les enjeux de conservation de cette espèce soient très importants, nous amène, nous plonge, jour après jour dans un autre monde.

Décrochage de la réalité, le temps se vit, se subit suivant les moindres réactions de l’oiseau. Les soins ont été multiples, compliqués, très prenants, nécessitant plusieurs heures par jour. Des centaines de pansements sur les plaies, des recherches, des massages pour faire circuler le sang et assouplir les tissus cicatriciels, des prises de sang, des opérations chirurgicales, des anesthésies, des rires, des larmes, des rencontres, des avancées, des complications…

Nous devions le soigner dans de multiples domaines : des arrangements tissulaires et musculaires plus ou moins profonds sur de nombreuses parties du corps, une patte très sérieusement endommagée, de multiples perforations au niveau de l’abdomen, deux plombs qui empoisonnent son sang, des tendons sectionnés, des œdèmes, un début de phlébite, des problèmes d’alimentation, une déshydratation due aux médicaments, à la chaleur…

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– Intenses émotions

Ces heures passées à panser, nettoyer ses plaies, faire et refaire jour après jour les mêmes gestes au même rythme, sans rien oublier, mais s’en oublier de vérifier le reste du corps, au cas où quelque chose d’autre apparaitrait… Réagir au moindre mouvement de l’oiseau, être sur le qui-vive. Une zone qui redevient sensible, le mouvement d’un doigt de la patte, nous sommes souriants à la moindre amélioration, nous plongeons à la moindre dégradation. Notre moral peut passer du beau fixe au trou noir dépressif. Nous vivons Gypaète, nous respirons Gypaète, nous rêvons Gypaète…

Un peu sans s’en rendre compte quelque chose se passe avec le temps, les jours, les semaines, les mois : une relation s’installe, une relation de confiance, un respect mutuel, un échange entre lui et les deux soigneurs. Sans faire d’anthropomorphisme nous essayons de lui faire comprendre que ça va aller, qu’il faut qu’il nous fasse confiance. Et cela a l’air de fonctionner. Le Gypaète se laisse attraper et manipuler sans broncher.

Habituellement nous couvrons toujours la tête des animaux pour les soins afin qu’ils restent calmes et limiter leur stress mais lui a toujours refusé. C’était tout le contraire ! Il fallait qu’il voie ce qui se passe, il suivait les mouvements des soigneurs, il était calme et parfois il s’endormait même sur la table. Cela nous a permis de l’observer et c’est peut-être là que tout s’est joué !

Un cercle rouge pointé dans votre regard, déstabilisant, intense, émouvant, pénétrant. Des pleurs, des frissons…7 bénévoles sont tombés dans les pommes en nous aidant à le soigner. Nous n’avons jamais connu ça, cet oiseau nous a retournés émotionnellement, il nous a appris beaucoup et surtout il nous a donné la force de nous écouter et de nous surpasser. Le soigner n’était pas une chose facile, cela a demandé de nombreux sacrifices et de gros efforts.

– Comment va-t-il ?

Comme vous pouvez le voir sur la carte, Jacques le Gypaète se déplace bien sur la chaine des Pyrénées avec une nette préférence pour le Pays Basque. Ce qui ne l’empêche pas d’aller se promener en moyenne toutes les trois semaines dans le secteur du Parc National des Pyrénées. Mission réussie pour Hegalaldia.

Vole l’ami et que le vent te porte vers de nouvelles aventures !

Relâcher de Jacques (15/09/2015)

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