Alors que les deux tiers de la surface terrestre sont couverts d’eau, les oiseaux marins ne représentent que 3% des espèces d’oiseaux du monde !

Les oiseaux marins sont très visibles tant sur le littoral qu’au large. Pourtant, la plupart des gens ne les perçoivent pas comme des créatures marines, comme les baleines ou les phoques, car beaucoup d’entre eux  reviennent à terre pour se reproduire ou pour se poser sur des rochers et des îles. Néanmoins, beaucoup d’entre eux tirent leur alimentation de la mer, et forment de ce fait une partie importante de la chaîne alimentaire marine : en ce sens, la mer constitue leur milieu de vie, tout autant que celui des crabes et des coraux.

A Hegalaldia, nous soignons les oiseaux marins retrouvés en détresse sur la côte. L’hiver est la période où nous en recueillons le plus. Nous souhaitons par cet article vous présenter les espèces que l’on accueille le plus et aussi les problématiques rencontrées par celles ci.

Les espèces majoritairement accueillies à Hegalaldia

  • Fou de Bassan

Oiseau du milieu océanique, son nom lui vient de l’île de Bass en Ecosse où une très grande colonie s’est formée.

Le Fou de Bassan repère les bancs de poissons en vol et plonge en piqué pouvant atteindre 30 mètres. En adoptant une posture aérodynamique typique (à l’image d’un concorde), il peut rentrer dans l’eau à 100km/h sans se blesser grâce entre autres à ses narines à l’intérieur du bec !  Il plonge ainsi à 6-7 mètres de profondeur, provoquant une onde de choc qui assomme les poissons. Il englouti sa proie sous l’eau, ce qui fait que les premiers observateurs, pêcheurs écossais, le trouvaient complètement fou d’effectuer ces plongeons spectaculaires et de remonter bredouille !

Les couples sont unis à vie, se formant vers 5-6 ans, lorsque l’oiseau atteint sa maturité. La femelle pond un seul œuf à la fois et le petit, une fois sorti de son œuf, va garder les yeux fermés pendant trois jours et sera nourri également de nuit ! Au bout de 11 semaines de gavage, le petit pèse 1kg de plus que l’oiseau adulte ! Il est donc trop lourd pour voler et nagera pendant près d’un mois avant de pouvoir chasser en vol.

Le Fou de Bassan pêche des harengs, des maquereaux, des sardines, et ce même la nuit.

  • Guillemots de Troïl

Hivernant notamment en Manche et dans le golfe de Gascogne, les Guillemots de Troïl forment des troupes importantes qui sillonnent la haute mer en quête de nourriture, presque exclusivement des poissons.

L’unique œuf de l’unique ponte est déposé à même la roche. Le petit sera accompagnés par ses deux parents durant les trois premières semaines de sa vie. Mais le départ du nid pour l’oisillon est assez impressionnant. En effet, celui ci va sauter d’une falaise de plusieurs dizaines de mètres pour atterrir dans l’eau alors qu’il ne fait que le quart de sa taille d’adulte et qu’il ne sait même pas voler. Mais le père, qui d’ailleurs reste à côté de lui lorsqu’il fait le grand saut, va continuer de s’occuper de lui.

Mais un avantage à ce saut très risqué existe. Les chercheurs ont découvert qu’un petit qui vit dans l’eau grandit deux fois plus vite qu’un oisillon qui serait resté dans le nid. Et la raison de cette différence est toute simple : une fois son petit dans l’eau, le père qui fournit la majorité des soins parentaux, n’a pas besoin de faire la navette entre la mer et le nid pour nourrir son petit. Ce temps gagné lui permet de sustenter bien plus souvent l’oisillon. La mère, de retour dans la colonie, va s’accoupler avec d’autres mâles afin de se trouver un nouveau partenaire dans le cas où l’autre ne reviendrait pas. Pendant ce temps, le père passe en moyenne six heures par jour sous l’eau pour nourrir son petit. Il va tenir ce rythme pendant 56 jours chez les Guillemots de Troïl. Par la suite, l’oisillon devient plus indépendant ce qui permet au père de diminuer ses aventures sous-marines et de souffler un peu. Dur d’être père chez les guillemots !

  • Pingouin Torda

Le Petit pingouin ressemble partiellement aux guillemots. Ses ailes courtes et arrondies lui permettent de voler mais aussi de se déplacer vite dans l’eau. Mais, savez vous quelle est la différence entre le pingouin et le manchot ? Eh bien, le manchot ne vole pas ! Aussi, il n’a existé que deux espèces de pingouins dans le monde, une (le Grand pingouin) a disparu en 1844 en Islande. Il ne reste donc plus que le Pingouin torda ! La confusion vient de l’anglais où « pingouin » est utilisé pour désigner certains manchots.

Exclusivement un oiseau de mer, le Pingouin torda se rend sur la terre ferme seulement pour la reproduction. Il niche généralement en couples isolés ou en colonies lâches sur les corniches rocheuses, contrairement au Guillemot de Troïl qui forme des rassemblements denses. L’unique œuf de l’unique ponte est déposé à même la roche. L’œuf est conique afin d’éviter un roulé-boulé dans la mer en contrebas.

Avec un très fort déclin, le Pingouin torda est l’oiseau marin le plus menacé de France.

  • Autres espèces

Le Macareux moine : aucune confusion possible pour cet oiseau marin dont le bec est la partie la plus remarquable. Il l’utilise pour stocker ses proies. Surnommé le clown de mer, il passe le plus clair de son temps en haute mer.

Les puffins sont des oiseaux marins de taille petite à grande. Tous possèdent des narines à la base du bec. Avec leurs ailes le plus souvent longues et étroites, ils sont profilés pour des déplacements de longue distance en haute mer, profitant des vents et des mouvements d’air créés par les vagues pour minimiser les efforts et donc les dépenses énergétiques. Leur vol est puissant, aisé et souvent spectaculaire. Les pattes palmées leur permettent de nager en surface et de plonger.

Le Grand Labbe est la terreur des autres animaux, on l’ appelle « le pirate des mers ». Ces oiseaux poursuivent les mouettes et les sternes, les obligeant à lâcher leur proie, qu’ils rattrapent au vol. Ils attrapent tout ce qu’ils peuvent, depuis les ver, jusqu’aux poissons, oiseaux et petits mammifères. Ils peuvent aussi se nourrir des cadavres d’animaux que la mer rejette sur la côte.

Le Fulmar boréal est actif de jour durant la nidification (contrairement à ses congénères). Les jeunes crachent un suc gastrique nauséabond pour se protéger des intrus !

De gauche à droite : Fou de Bassan adulte (en blanc) et juvénile (noir tacheté) – Pingouin torda – Guillemots de Troïl – Macareux moine

Les problématiques hivernales rencontrées

L’Hiver, de nombreuses problématiques s’offrent aux oiseaux marins, ce qui explique leur accueil.

Lors de tempête durant plusieurs jours, les oiseaux marins, qui ne peuvent pas s’abriter, se retrouve confronter à deux solutions : soit ils se posent en mer et dérivent à cause du vent – c’est comme ça qu’on retrouve parfois des oiseaux d’Amérique sur les côtes européennes ! –, soit ils restent en vol et se fatiguent. D’où l’important nombre d’oiseaux marins retrouvés sur les plages, exténués, après des tempêtes. Il serait donc judicieux de rester attentifs lors de vos promenades sur la plage.

Lors des tempêtes, les contrôles en mer étant moins fréquents, les navires en profitent pour vidanger ou nettoyer leurs cuves en mer. Or, certains oiseaux marins plongent allègrement en quête de bancs de poissons, ce qui peut leur être fatal : l’oiseau plonge sans s’en rendre compte dans des nappes de pétrole ou autres hydrocarbures résiduels. Et malheureusement, une tâche de mazout rend le plumage non étanche ce qui entraine l’hypothermie et une impossibilité de nager et de pêcher. De plus, cela peut entrainer une intoxication si l’oiseau s’essaie à se nettoyer.

Les déchets flottants et dérivants sont aussi source de blessures pour les oiseaux. Les hameçons, leurres ou filets sont avalés ou piqués dans les ailes ou l’œsophage. Des captures accidentelles dans les filets maillants sont malheureusement fréquentes où les oiseaux meurent noyés. Les morceaux de plastique ingérés créent des occlusions.

La surpêche crée un manque de ressources alimentaires, ce qui met réellement en danger les oiseaux marins, qui se nourrissent presqu’exclusivement de poissons. A Hegalaldia, nous pouvons voir une évolution. Un guillemot recueilli en 2006 pesait en moyenne 850 grammes. Mais aujourd’hui, c’est une moyenne de 650 grammes.

Les oiseaux marins sont des espèces très difficiles à soigner en temps normal, car ressentant beaucoup de stress en captivité. Ils dépriment et se laissent parfois même mourir. En hiver, nous pouvons donc accueillir des oiseaux marins cumulant les causes d’accueil présentées précédemment, ce qui rend les soins assez compliqués.

Lors de tempêtes, n’hésitez pas à ouvrir l’œil et si vous remarquez un oiseau en difficulté. Plus vite l’oiseau sera récupéré par un centre de soins, plus il aura de chance d’être relâché !